LA LETRA OCCITANISTA

MARSEILLE 17 OCTOBRE 2015

Regions et Peuples Solidaires

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LO CONVIDAT DAU CEBIER. François Alfonsi, député parlementaire européen.

Pour une autre politique méditerranéenne

François ALFONSI:

 

« Il faut relancer un projet en partant de l’Europe » 

 

- Lo Cebier : François Alfonsi, ton travail de  parlementaire européen sur une stratégie macro-régionale pour la Méditerranée nous semble nouveau, confronté aux habitudes des initiatives prises au Nord de l'Europe. Peux-tu nous dire rapidement en quoi il consiste ?

 

- François Alfonsi : La Méditerranée est partie intégrante de l’Union Européenne dont le territoire couvre toute la partie nord du bassin maritime. Or le constat est clair d’une situation qui se dégrade chaque année davantage : augmentation des pressions anthropiques, habitants permanents et tourisme, recul de la biodiversité, mise en péril des herbiers de posidonie qui sont un poumon pour la ressource halieutique et qui jouent un rôle important pour capturer les gaz à effet de serre, invasion par les déchets plastiques, pollutions des routes maritimes et dans les ports, etc…

 

Or face à ces problèmes, dont aucun n’a de solution valable s’il est pris séparément par une région ou même un Etat membre, aucune réponse n’est apportée. Les seules réponses crédibles sont possibles par une coopération renforcée au niveau européen.

 

Par contre dans les mers du nord de l’Europe, particulièrement la mer Baltique, l’Europe et les pays concernés ont mis en place une stratégie macro-régionale dont dix ans plus tard on commence à mesurer les effets. Les effluents des cours d’eau côtiers charrient moins de nitrates, les normes environnementales de navigation ont été renforcées en luttant contre les oxydes de soufre, les oxydes d’azote et les particules fines, etc…

 

Un exemple parlant : un des  derniers bateaux acheté pour desservir la Corse est la récupération d’un ferry désormais interdit de naviguer en mer Baltique. On ne peut mieux illustrer le décrochage des standards de vie entre le nord et le sud de l’Europe. Mon rapport fera pression sur le Conseil et la Commission pour qu’ils s’engagent sur la même voie en Méditerranée.

 

- L. C. : Ton travail antérieur sur l'économie et les relations entre les îles méditerranéennes était déjà une préoccupation centrale. C'est donc un élargissement de la question méditerranéenne ? Quels en sont les objectifs ?

 

- F. A. : Ce que j’attends c’est que l’Europe prenne ses responsabilités dans l’espace méditerranéen. Certes, les conditions politiques rencontrées sur la rive sud ne sont pas très favorables. Raison de plus pour s’engager : si l’Europe ne le fait pas fortement, on peut être certain qu’il ne se passera rien, et que la situation continuera de se dégrader. 

 

Les Iles sont au premier rang de ces priorités. Une Méditerranée plus durable ça les concerne au premier chef. Et la coopération entre régions que matérialisera une stratégie macro-régionale permettra de mieux combattre leurs handicaps liés à l’insularité. C’est aussi une façon de recentrer nos stratégies de développement sur l’espace méditerranéen qui est notre espace naturel et historique. 

 

- L. C. : La question des Etats de l'UE concernés par leurs territoires méditerranéens repose le problème des formes de développement. Pour l'espace occitan et l'Arc méditerranéen, c'est un nouvel angle d'attaque important qui permettrait de mettre en place une autre logique que la logique septentrionale actuelle qui domine l'Europe. Quels sont les obstacles majeurs pour nos régions occitanes, catalanes où les logiques centralistes sont toujours très fortes ?

 

- F. A. Chaque région européenne continentale de l’espace méditerranéen aura vocation à piloter le projet, en se répartissant les thématiques. Elles seront en quelque sorte en compétition. La Catalogne est déjà le siège officiel de l’Union pour la Méditerranée, une construction politique créée en 2011, mais aujourd’hui paralysée par l’enlisement des conflits sur la rive sud. Il faut relancer un projet en partant de l’Europe.

 

Elle en a les moyens, économiques et technologiques, la capacité administrative grâce à l’Union Européenne et à son expérience de coopération interrégionale, et la responsabilité dans la mesure où 50% du bassin méditerranéen est son propre territoire. Seule son implication peut redynamiser les coopérations avec la rive sud et apporter les réponses environnementales, politiques et culturelles que nous attendons, et qui sont vitales pour nos territoires.