LA LETRA OCCITANISTA

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Anne-Marie Hautant : "Jacques Bompard est un chat" - Le Dauphiné - 16 mars 2019

Le conseil municipal, s’est ouvert, hier matin, par un long débat sur le dernier rapport de la CRC, dans un climat électrique. Avec chacun sa lecture des conclusions.

 

Tout le monde s’y attendait : les élus comme le public venu en nombre assister au débat. Le conseil municipal d'Orange, qui s’est ouvert, ce vendredi 15 mars au matin, sur les observations de la Chambre régionale des comptes (CRC) aura tenu ses promesses, côté ambiance houleuse (lire notre dossier sur le rapport paru le 13 mars). On n’a pas compté le nombre d’invectives entre les représentants de la majorité et ceux de l’opposition. Si bien que les échanges ont souvent tourné à la cacophonie et les quatre suspensions de séance n’ont pas toujours ramené le calme qui sied au débat démocratique.

 

Au lendemain, de son procès, au tribunal de grande instance de Carpentras, Jacques Bompard n’a pas fait l’impasse du sujet (lire par ailleurs) mais a demandé à l’opposition de ne pas « rejouer » les débats de la veille. Si sur ce point, les conseillers municipaux d’opposition n’ont pas apporté de commentaires, ils ont fusé sur les observations de la CRC (lire par ailleurs). Avec il faut bien le reconnaître, une lecture des plus divergentes que l’on soit dans la majorité ou dans l’opposition.

 

Pour Jacques Bompard, les observations de la Chambre régionale des comptes « montrent la bonne santé financière de notre commune. Elle cite “un objectif constant de maîtrise des dépenses”. C’est un point positif qui respecte les recommandations nationales de la Cour des comptes. La CRC a souligné par deux fois, la situation financière excédentaire de la Ville, ce qui révèle la pérennité financière de la commune. Là encore, on s’inscrit parfaitement dans l’analyse de la Cour des comptes qui dans son rapport public de 2019 note “qu’il est nécessaire pour l’État de poursuivre la réduction des déficits nominaux et structurels”.

 

L'opposition dénonce « un pilotage à vue de la commune »

 

Des conclusions de la CRC, le maire retient également qu’en baissant ses taux d’imposition, « Orange dispose de taux inférieurs de 6 % aux taux moyens dans un contexte de contrainte budgétaire ayant amené nombre de communes à relevés leur taux ». Et dans un contexte national contraint, « la Ville fait preuve d’exception en amortissant bien le choc grâce à sa maîtrise des dépenses. Nous disposons comme le souligne la CRC d’un financement propre disponible élevé, ce qui manifestement n’est pas le cas de toutes les collectivités ». Pour Jacques Bompard, « malgré les six recommandations édictées par la Chambre régionale des comptes, la ville d’Orange « respecte en tout point les consignes de sa grande sœur, la Cour des comptes ».

 

Une vision qui sera loin de faire l’unanimité sur le banc des élus de l’opposition. Tour à tour, toutes les sensibilités de l’échiquier politique orangeois ont pris la parole. En chœur, ils dénonceront « un pilotage à vue de la commune » et « une manipulation » des observations de la Chambre régionale des comptes…

 

GILLES LAROYENNE : « LA VILLE EST ENDETTÉE »

 

« Ce rapport est une vraie mission d’investigation » a souligné Gilles Laroyenne, conseiller municipal LR, en prenant, hier matin, la parole. Selon lui, « il donne une vision de la gouvernance de la municipalité faite d’un mélange de laxisme et d’incompétence ». Dans les conclusions de la Chambre régionale des comptes, Gilles Laroyenne a relevé que « l’effort fiscal à Orange reste à un niveau non justifié par les besoins financiers de la commune » et que « la politique d’investissement de la commune résulte d’un pilotage à vue ».

 

« En vérité, j’ai aujourd’hui de la peine pour les Orangeois et je suis en colère en tant que citoyen. Ne pas entretenir sa maison, c’est laisser la charge aux générations futures de faire le travail : est-ce cela votre idée d’une gestion en bon père de famille ? » a-t-il lancé. Et d’ajouter : « Je l’affirme, la ville est endettée de tous les travaux non réalisés et d’une vétusté qu’il nous faudra rattraper. La Ville est plombée par la pauvreté et le chômage, la désertification commerciale et le déclin démographique ».

 

FABIENNE HALOUI VEUT UN SERVICE DE QUALITÉ

 

La conseillère municipale communiste, Fabienne Haloui, a ouvert le feu des remarques, à la lecture du rapport de la CRC. Elle a notamment relevé un « taux d’exécution des investissements bien inférieur à ce qui se fait dans d’autres communes » ou encore « une absence de mise en valeur de notre patrimoine ». Et d’ajouter « l’argent collecté par l’impôt doit permettre un service public de qualité à des prix accessibles pour tous », or « vous naviguez à vue, il n’y a plus de pilote. Vous faites croire que vous diminuez les impôts locaux, mais votre diminution c’est du trompe l’œil car vous savez que l’augmentation des bases permet au final que vos recettes fiscales soient à la hausse. Vous êtes dans la manipulation permanente. Ce rapport confirme ce que nous savions déjà, Orange est une ville qui a beaucoup d’atouts mais qui décline en raison de vos choix ».

Et d’asséner : « C’est une ville en trompe l’œil où seule la vitrine compte : la politique des ronds-points, des trottoirs et des goudrons se poursuit en attendant une rénovation urbaine qui ne vient pas. Les Orangeois attendent la 11e école publique, le parc aquatique, et une cuisine centrale pour réintégrer la restauration scolaire dans le public ou encore la plaine sportive ».

 

ANNE-MARIE HAUTANT : « JACQUES BOMPARD EST UN CHAT »

 

« C’est la troisième fois que la CRC vient au cours de vos mandats » a relevé d’entrée Christine Badinier, du groupe « Aimer ma ville ». Et de poursuivre : « Vous ne gouvernez pas, vous naviguez à vue, avec comme unique boussole, la phobie de la dépense publique ». Sa co-listière, Anne-Marie Hautant, a renchéri : « pour la troisième fois, la CRC épingle le maire pour sa relation à l’argent public. De 1995 à 2013, la municipalité de Jacques Bompard a prélevé à grandes brassées dans le porte-monnaie des Orangeois tout en supprimant quasi tous les services qui étaient en place. » Pour la conseillère municipale d’opposition, » le maire d’Orange est un chat. Il sait toujours retomber sur ses pattes quoiqu’il arrive. C’est un art qu’il cultive incessamment. En relisant les précédents rapports de la Chambre régionale des comptes, on voit très bien que les mêmes observations reviennent. Mais cela ne semble pas toucher le maire… » a-t-elle conclu, en substances, tout promettant que de ce dernier rapport, « on en reparlera ».

 

AMBIANCE ÉLECTRIQUE

 

Que dire de l’ambiance de ce nouveau conseil municipal qu’on n’ait déjà écrit ? Il aura été fidèle aux précédents. Avec peut-être des crispations renforcées. Le rapport de la CRC venant apporter de l’eau au moulin de l’opposition… Si bien que le débat a finalement tourné court. En laissant la parole à Rémy Canuti, le DGS, le maire a soulevé un tollé de l’opposition. « Ce n’est pas un élu, il n’a rien à dire ce monsieur » ont-ils lancé.

 

Devant le brouhaha suscité, le maire suspendra la séance deux fois en un quart d’heure. « La CRC a fait six recommandations, si vous estimez que l’importance est ailleurs, c’est que vous avez une vision partisane » glissera toutefois Rémy Canuti. Concernant le taux des investissements pointés du doigt par la CRC, Jacques Bompard est revenu sur le projet du pôle aquatique. « Si cet investissement, on l’a enlevé, c’est du fait de l’État. J’ai d’ailleurs sollicité de nouveau le préfet pour ce projet ». Concernant les logements, « nous intervenons sur tous les types. Et nous faisons ce que l’on peut. Y’a que Dieu de parfait. Le développement économique ? Si nous arrivons à faire une zone franche à Orange, on fera venir des entreprises » répondra le maire. Avant de mettre un terme au débat. « Si vous ne me laissez pas répondre, ce n’est pas la peine non plus que vous preniez la parole »…

 

POUR JACQUES BOMPARD : « DES RÉQUISITIONS DÉMESURÉMENT SÉVÈRES »

 

Jacque Bompard, le maire d’Orange, est revenu, hier matin, en ouvrant la séance sur son audience devant le tribunal correctionnel de Carpentras. « Comme vous l’avez déjà tous appris, j’ai traversé jeudi une très longue audience au TGI de Carpentras où m’ont envoyé de vieilles rancœurs politiques ». Il ne commentera pas davantage « ce procès en suspens par respect pour l’ordre du jour de ce conseil », mais dont « les réquisitions sont démesurément sévères. Je préciserai seulement, à toutes fins utiles, que je conserve et ma sérénité et la conscience d’un délit supposé dont ni l’intentionnalité ni la matérialité n’ont été établies ».

 

Et d’ajouter « qu’il a été reconnu par l’ensemble des magistrats présents jeudi, ainsi que par ceux de l’instruction, qu’il n’y a ni enrichissement personnel ni appauvrissement de la commune dans cette affaire vieille de 15 ans. Je sais depuis Marc Aurèle que la vie ressemble plus à la lutte qu’à la danse, qu’il vaut mieux s’endurcir des coups imprévus, mais je demanderai aux membres présents de l’opposition non pas de se taire mais de ne pas rejouer ici, vainement, les longs débats de jeudi ».

 

Quelques heures après le conseil, au lendemain de l’audience, les élus d’opposition ont tous souligné la lourdeur de la réquisition. « Vu la réquisition, le parquet doit avoir du lourd, a glissé Anne-Marie Hautant. On se demandait si ce dossier allait sortir un jour, on est bien content que ce soit le cas. » Un sentiment partagé par Fabienne Haloui. « J’ai toujours dit que la gestion du Maire d’Orange était une vitrine avec l’envers du décor, cette affaire peut devenir l’envers que beaucoup d’Orangeois ont refusé de voir jusqu’à présent. Il semble que Jacques Bompard soit surpris par la sévérité du réquisitoire du Ministère Public. C’est une façon de rappeler que les élus de la république doivent être exemplaires. » L’élu LR, Gilles Laroyenne, de son côté trouvait que cette affaire est de mauvais aloi pour la ville. « C’est dommage qu’Orange ait son nom mêlé à cette affaire. Nous n’avons pas besoin de ça. »

 

ÇA BALANCE PAS MAL…

 

« Vous avez maigri Madame Haloui », a lancé le maire Jacques Bompard alors que l’élue communiste Fabienne Haloui venait de se lever pour lui porter un mot manuscrit, lui rappelant qu’elle avait une question orale à poser en fin de conseil.

 

« Si vous saviez ce que j’en ai à faire de vos remarques Monsieur Bompard », lui a-t-elle alors lancé.

 

« Quand on promène ses fesses alors qu’on n’en a pas le droit, il faut s’attendre à des réflexions », a renchéri le maire rapidement coupé par Gilles Laroyenne : « Est-ce que vous vous seriez permis de dire cela à un homme Monsieur Bompard ? » Une interrogation appuyée par le reste de l’opposition alors que Guillaume Bompard, qui faisait son retour après une absence lors de plusieurs conseils a asséné : « Ne soyez pas jalouse Monsieur Laroyenne, vous aussi vous avez maigri ! »

 

Plus tôt, une autre altercation avait éclaté entre l'opposition et le maire. Ce dernier ne supportant pas que les élus d’opposition prennent la parole pendant ses réponses. «Je vous ai laissé parlé longtemps même si vous dites des sornettes alors laissez-moi répondre sinon c’est désespérant pour la démocratie.»

 

En fin de séance, c’est la députée Marie-France Lohro qui a pris la parole pour revenir sur les nombreuses altercations : « Je ne peux pas siéger tout le temps au conseil municipal mais vu ce qu’il s’y passe, je ne regrette pas… Il faut respecter les gens qui se déplacent pour assister au conseil ! »